La prairie urbaine : un projet fleurissant sur le campus

PAR PASCALE FILLION – AGRONOMIE

Le 6 septembre dernier, c’était la rentrée universitaire sur le campus de l’Université Laval. Alors que des milliers d’étudiants revenaient à Sainte-Foy après un long congé bien mérité, certains n’avaient tout simplement pas quitté le campus. Que ce soit pour des cours d’été ou des stages étudiants, il reste que le cerveau ne s’est pas reposé cet été et qu’une autre session recommence. Eh oui! Je fais partie du groupe des neurones échauffés et je veux vous parler du projet auquel j’ai eu la chance de participer cet été sur le campus : la prairie urbaine.

L’avez-vous remarquée? Cette prairie est située au croisement de la rue de la Terrasse et de la rue de la Médecine, dans l’espace vert à côté du pavillon d’optique-photonique. Parmi les étudiants du campus, ceux du pavillon Comtois sont les mieux placés pour identifier les différents couverts végétaux sur les parcelles. Cette année, du sarrasin, de l’avoine, du seigle, du trèfle incarnat, un peu de radis et de mélange de fleurs annuelles ont été plantés. Or, l’aménagement prévu dans les prochaines années mettra en valeur des mélanges de vivaces et légumineuses.

Ce projet provient de la collaboration de Mme Alison Munson, professeure titulaire à la Faculté de foresterie, de géographie et de géomatique de l’Université Laval et Mme Élise Beauregard, a.a.p.q., candidate à la maîtrise avec spécialisation en sols urbains (FFGG). Cette dernière, architecte paysagiste accomplie, a décidé de se spécialiser dans la restauration des sols urbains. Elle désirait parfaire ses connaissances scientifiques sur les sols afin d’intégrer un volet de préservation des sols à la planification urbaine. Elle fait présentement sa maîtrise sur l’amélioration de la fertilité et la structure des sols urbains par l’apport de matière organique. Son dispositif expérimental à Montréal a inspiré l’aménagement de la prairie urbaine sur le campus.

Dans son essai « pour la valorisation de la fertilité des sols en milieu urbain » (2015), elle décrit, entre autres, l’état des sols et surfaces gazonnées en ville et souligne l’importance du rapport sol-plante et des écosystèmes hors et sous le sol. C’est en solution aux problématiques qu’elle a mentionné (paragraphe suivant) que la prairie urbaine a été créée.

Le gazon est largement utilisé dans les villes pour l’aménagement d’espaces verts. Bien qu’ils amènent un verdissement des villes, une séquestration de carbone et qu’ils réduisent l’érosion, ces graminées sur lesquels nous marchons requièrent un entretien récurent amenant la compaction et la pollution par le lessivage possible des engrais. En fait, la source du problème est plus profonde. Elle se trouve à quelques centimètres sous le sol. Avec la manipulation des sols en ville lors de différentes constructions, le sol se trouvant sous les surfaces gazonnées est perturbé (compaction, déficit en matière organique, perte de structure, etc.). Les processus naturels qui sont régulés par un écosystème en santé sont alors diminués, ce qui rend difficile la croissance des plantes. Le gazon n’est alors pas assez efficace dans l’accomplissement de son rôle écologique.

Durant les prochaines années, un apport de matière organique par l’application de compost et par l’incorporation de résidus végétaux tels des légumineuses permettra de restaurer la fertilité du sol des parcelles à l’Université Laval. Ceci aura comme effet bénéfique d’améliorer les propriétés physiques (structure, rétention d’eau), chimiques (minéralisation, pH) et biologiques (disponibilité d’éléments nutritifs) du sol. Des parcelles de pelouse non tondues, d’engrais verts et de vivaces seront plantées dans un premier temps pour décompacter le sol et augmenter la teneur en matière organique. Par la suite, l’implantation à long terme de mélanges de légumineuses et de vivaces augmenteront la biodiversité et réduira la récurrence des perturbations humaines sur le sol.

Dans l’objectif d’une gestion durable de l’environnement urbain, la prairie urbaine de l’Université Laval est plus qu’un aménagement de végétaux aux couleurs et textures agréables à l’œil. Elle amène l’observation scientifique pour des étudiants désireux d’apprendre, améliore l’appréciation environnementale des lieux et propose des pratiques d’entretien écologiques et moins chères. Finalement, elle demeure une solution et une prise de conscience sur l’importance de la préservation et restauration des sols en milieu urbain.

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